Quelque part, dans une salle de musculation, il y a un jeune homme qui s’entraîne, il soulève en cadence un haltère. Le mouvement révèle ses muscles saillants et agite ses cheveux autour de son visage, par instant un éclair vert surgit d’entre la masse brune. L’homme se lève et boit longuement. Quelques gouttes s’échappent et perlent sur son menton. Elles forment une ligne fluide qui s’étend vers son cou et glisse vers son torse nu et puissant. Derrière la fenêtre de la salle, Raphaël colle son visage contre la vitre. Avec envie, il suit du regard le tracé mouillé sur la peau bronzé qu’il devine si douce, soyeuse. Il aimerait tant pouvoir le suivre de sa langue. Avec ses mains il caresserait le buste puis les abdominaux finement dessinés et l’autre l’encouragerait par des halètements sourds, l’autre à la silhouette sculpturale et ses yeux si verts. Et puis ses mains descendraient encore, sous les tissus gênants du brun pour se perdre dans les limbes du plaisir.
Le rêve est brutalement interrompu.
« Raphaël, je dois y aller »
Pendant quelques instants, Raphaël cherche à se convaincre que s’il ouvre les yeux, à ce moment précis, il rencontrera les yeux verts qui l’obsèdent tant. Mais la voix n’est ni grave, ni envoûtante comme celle qui est prisonnière de son esprit et qui peuple ses songes. La voix est perçante et légèrement plaintive.
« Va-t-en »
Raphaël se force à se réveiller car il sait qu’il l’a blessé. Ses yeux s’entrouvrent et ne rencontre qu’un regard désespérément gris où transparaît la douleur d’être rejeté.
« Excuse-moi
-Pourquoi est-ce que tu fais ça ?
-Pourquoi est-ce que je fais quoi ?
-Pourquoi, est-ce que tu es toujours aussi méchant alors qu’hier soir tu m’aimais passionnément ? Tu détruis notre relation. »
Raphaël hésite à lui dire qu’il n’y a rien qui les unit à part le sexe et que s’il lui fait encore l’amour c’est parce qu’il s’imagine serrer un autre… l’autre, le brun aux yeux verts. Mais il ne dit rien parce qu’il n’a rien à dire. Les excuses ne changent jamais rien, seul le temps fait passer les choses. Il lève la tête vers le jeune homme qui attend anxieusement une réponse. Leo ne représente rien pour lui, seulement un contenant où il peut déverser sa frustration. Pourtant son physique n’est pas déplaisant, sa chevelure blonde scintille dans la lumière matinale qui éclaire son corps gracile. Raphaël ne sait pourquoi il ne peut aimer Leo, ou plutôt si il le sait mais cela il ne veut pas se l’avouer et réaliser qu’il poursuit un souvenir, alors ses lèvres restent closes, que peut-il dire ? Le regard du blond se durcit et la colère transparaît sous ses traits. Il se lève soudainement et quitte la pièce. La porte claque et Raphaël se retrouve seul. Sans surprise il observe son sexe tendu sous le drap. Dans son esprit les yeux verts le regardent, moqueurs. La main du jeune homme se crispe sur son membre et court sur la verge. Les mouvements sont saccadés et frénétiques, lui attirant autant de souffrance que de plaisir alors qu’il lui semble voir l’autre entre ses jambes. L’autre, qui approche lentement sa langue du gland, centimètre par centimètre, et à mesure, comme un feu ardent, la jouissance grandit dans les reins de Raphaël. La volupté l’emporte et alors qu’il peut presque voir le triangle rose le lécher, l’envelopper… Les va et vient se font de plus en plus violent, il hurle de mal et de bien-être. Et l’orgasme le bouleverse. Raphaël reste étendu, las, la vision a disparue, des larmes de honte et de douleur coulent sur ses joues.